Islamabad - Gilgit : Traversée du Kohistan, du Cashmire aux Northern areas, 650 km du 23/03 au 02/04

Au depart d'Islamabad, pour rejoindre la fameuse "Karakoram Highway" qui doit nous mener jusqu'en Chine, nous avons le choix entre la route des plaines ou la route passant par Murree, station de montagne prisée des touristes pakistanais. Apres une semaine étouffante a Islamabad, nous decidons de partir chercher l'air frais des montagnes autour de Murree, et puis nous sommes sur la route des cimes alors... La route est raide mais les paysages variés et l'acceuil des pakistanais rendent les journées tres agréables.

 

Apres une rude journee de velo, rien de tel qu'un petit diner de cou de canard farci pour se remettre d'aplomb!
Apres une rude journee de velo, rien de tel qu'un petit diner de cou de canard farci pour se remettre d'aplomb!

Cette région se situe dans le sud du Cashmire, zone disputée entre l'Inde et le Pakistan qui ne s'entendent pas sur leur frontiere dans ces regions montagneuses. Le conflit est maintenant plus ou moins gelé mais des soldats sont toujours postés de chaque cotes des cretes, tenant meme leurs positions sur les glaciers plus au nord, et se surveillent mutuellement. Cela fait bizarre de se dire que nous sommes a seulement 100km a vol d'oiseau de Shrinagar, la plus grosse ville du Cashmire indien.

Ici nous sommes encore loin des hauts sommets et des geants de l'himalaya, mais dans ces grosses collines les montees sont redoutables, notre retrouvaille avec les montagnes est rude!

Loin de la chaleur des plaines, nous apprecions les forets des contreforts du Cashmire
Loin de la chaleur des plaines, nous apprecions les forets des contreforts du Cashmire

Peu apres Murree, la route redescend dans la vallée a Abbotabad pour rejoindre la Karakoram Highway (KKH)qui nous menera jusqu'a Kashgar en Chine. C'est le moment que choisissent nos estomacs pour nous poser quelques problemes. Les pauses forcées se multiplient et nous avancons péniblement. La pluie fera egalement son apparition et nous obligera a nous arreter a Sinkiari pendant une journée, apres a peine 20 km de vélo. Sinkiari est une "charmante" petite bourgade de bord de route ou nous trouverons une place pour dormir sur un charpoy (lit de corde que l'on retrouve frequemment dans les dabbas : les petits resto-route) d'un relais routier tenu par des afghans. Les couvertures sont pleines de puces mais vu notre etat de fraicheur et de propreté, elles n'oseront pas s'attaquer a nous!

Nous sommes tellement emballé par cette ville que nous y resterons une journee entiere a faire des aller-retours entre notre lit et les toilettes, sans meme sortir se ballader. Heureusement qu'apres une journée, le soleil revient (ce qui donnera finalement un peu de charme et de couleurs a la ville) et nos estomacs nous laissent un peu de repit! Nous pouvons reprendre la route vers le Nord et l'Indus Kohistan..

 

Apres l'orage de la nuit, les marchands profitent des premiers rayons de soleil, a Sinkiari
Apres l'orage de la nuit, les marchands profitent des premiers rayons de soleil, a Sinkiari

Apres ces premiers jours plutot tranquilles dans les collines, nous entrons dans la région NWFP (North West Frontier Province) et plus particulierement dans le district du Kohistan. Cette région a plutot mauvaise réputation parmi les touristes et particulierement les cyclistes: il parait que les etrangers ne sont pas toujours les bienvenus et que nous pourrions recevoir quelques pierres. Nous envisageons un moment de faire cette partie en bus (comme font la plupart des cyclistes) mais juger sur des "on dit" et des apriori une population et se priver de notre propre opinion nous gene et nous decidons finalement d'aller voir ce qu'il en est.

Les habitants des vallees du Kohistan, pour la plupart des patchouns assez conservateurs, ne se sont jamais soumis a aucune autorité, que ce soit sous les indes britanniques ou sous les Mughals avant. Meme aujourd'hui le controle du gouvernement pakistanais sur cette zone est partiel et se résume surtout a une présence policiere le long de la KKH.

Peu apres Dassu, dans les zones tribales du Kohistan, plutot desertes..
Peu apres Dassu, dans les zones tribales du Kohistan, plutot desertes..

Pour en rajouter une couche, il se trouve que fuyant leur pays ou ils sont traqués, des Talibans passeraient la frontiere pour venir se cacher dans ces vallées, dont la plus connue est la vallée de Swat, un temps reputée pour ses paysages de toute boôotée et attirant maintenant l'attention pour ses nouveaux habitants dérangeants.

Ne voulant pas offenser d'eventuels esprits conservateurs, nous decidons de porter le Shalwar kameez, l'habit traditionnel, pour continuer notre route. Dans un soucis de camouflage, Romain fait un tour chez le coiffeur et nos barbes font le reste. C'est une des particularité du Pakistan, les physionomies sont multiples et n'importe quel habitant de l'Eurasie pourrait se faire passer pour un Pakistanais (bien que ca puisse etre un peu plus dur pour les norvegiens ou les japonais). On sent ici les brassages ethniques qui ont eu lieu au fil des ans, et on retrouve un peu partout, des peaux bronzées d'indiens, des yeux legerement bridés de kirghize, des yeux clairs typiques des pachtounes etc. Sur le velo nous ne trompons personne mais c'est agreable de pouvoir se balader dans les bazars sans sentir des dizaines d'yeux braqués sur soi, comme ca l'etait auparavant, ainsi qu'en Inde, au Nepal...

 

Durant ces quelques jours, nous ne nous sentirons jamais en danger ou meme mal accueillis. Le long de la route, beaucoup de gens nous saluent, toujours aussi souriant, certes quelques gamins nous jettent des pierres, a 2-3 reprises, mais quand on decouvre qu'ils font aussi ca entre eux on est soulagés ;-). La facon dont sont traités les enfants par les adultes a aussi surement un role dans ce type de "jeux", la violence n'est jamais tres loin; en fait un jet de pierre, c'est presque un signe d'affection :-). Toujours est-il que pendant 2 jours la police préfere nous escorter, nous passons ainsi d'équipes en équipes, des jeeps aux motos. Nous ne comprenons pas tres bien si le danger éventuel viendrait de ces gamins, de leurs grands freres a l'affut de quelques mauvais larcins ou de la présence de Talibans dans le coin mais etre suivi d'un gars armée d'une Kalachnikov sur une moto ne nous rassure pas plus que ca, surtout quand lassé de devoir nous attendre, il nous invite a toujours aller plus vite. Facile a dire mon petit pere ! tranquille sur ta moto...

Avant Chilas, la "Karakorum Highway" traverse des paysages tres arides. Ici le vent annonce la pluie prochaine
Avant Chilas, la "Karakorum Highway" traverse des paysages tres arides. Ici le vent annonce la pluie prochaine

Peu avant Chilas nous entrons dans les Northern Areas (NA) l'extreme nord du Pakistan, ou se trouvent les vraies montagnes, l'extremité ouest de l'Himalaya, la plus grande concentration de sommets a 8000m, bref un beau programme..

Mais pour l'instant nous quittons les gorges encaissées, la vallée s'elargit peu a peu mais les paysages tres arides ne sont pas plus hospitaliers. Ce qui est étrange c'est que bien haut au-dessus de nous, nous voyons la limite des arbres, a partir de laquelle la végétation reprend ses droits jusqu'a des altitudes de 3 ou 4000m. Mais autour de nous, rien. A peine quelques touffes d'herbes ou de rares arbrissaux secs que des troupeaux de chevres traquent toute la journée, escaladant les flancs abrupts qui surplombent l'Indus 

La région est reputée pour ces gravures bouddhistes laissées par les voyageurs et marchands empruntant les chemins de la soie, du tibet a la perse, mais aussi par les locaux : avant que l'Islam ne fasse son apparition dans la region vers le 13eme siecle apres JC, le nord du pakistan etait majoritairement bouddhiste. Ainsi a Taxila a quelques dizaines de kilometres d'Islamabad, s'élevait jadis le second plus important monastere bouddhiste.

De complexes reseaux de canaux permettent la creation de petits oasis qui viennent egayer cet univers mineral
De complexes reseaux de canaux permettent la creation de petits oasis qui viennent egayer cet univers mineral

En commencant la KKH, nous n'esperions pas pedaler sur un parfait goudron mais on etait bien loin d'imaginer l'etat catastrophique de la route.. En fait, quand elle n'est pas detruite par des glissement de terrain, elle est en pleine reconstrction. Au final, entre Besham et Gilgit, on se demande si on ne passe pas plus de temps a pedaler sur une piste defoncée que sur du goudron.. et dire qu'on pensait en avoir fini avec la piste apres la Mongolie!!

Il faut dire que les conditions pour construire une belle route sont loin d'etre réunies: des gorges encaissées, une zone tres active sismiquement (c'est le point de rencontre ente les plaques eurasiatiques et indiennes, une partie de la route fur demolie lors du seisme de 2005), du rocher delité tres sujet aux glissements de terrain, et finalement un traffic assez important de camions surchargés! Le défi est de taille et la réalisation achevée il y a 30 ans apres avoir couté la vie a des centaines d'ouvriers pakistanais et chinois, malgré toutes ses dégradations, tient souvent du miracle et l'appelation parfois prétée a cette impressionante construction de " 8eme merveille du monde " ne semble pas completement usurpée.

 

La Karakorum Highway: des montagnes enormes, une route a flanc sujette aux eboulis, des camions surcharges bien decores et des travaux titanesques qui ne finissent jamais..
La Karakorum Highway: des montagnes enormes, une route a flanc sujette aux eboulis, des camions surcharges bien decores et des travaux titanesques qui ne finissent jamais..

Apres Chilas, nous passons au pied de la masse imposante du Nanga Parbat, le 8000m le plus occidental de l'Himalaya. L'indus, le 3eme grand fleuve de l'Himalaya que nous croisons - apres avoir longer le Bramapoutre au Tibet et traverser le Gange en Inde - delimite la limite ouest de la chaine himlayenne. Pour les puristes geographes, au dela on rentre dans le Karakoram.

Les dernieres etapes se font dans la poussiere, au milieu des travaux et c'est avec soulagement que nous atteignons enfin Gilgit, la capitale de la province. Non pas que la route soit meilleure apres (en fait plus loin un eboulement gigantesque bloque la valle et a cree un lac de 11km de long! il parait qu'on peut passer en bateau mais on en reparlera surement plus tard!) mais nous prevoyons de nous arreter une petite semaine dans la region pour profiter des alentours.

La plupart des cyclistes commencent la route a partir d'ici et bientot un couple de belges arrive, un couple d'australiens rencontre au Nepal et en Inde debarque un peu plus tard tandis, qu'un thailandais est deja sur la route et qu'un slovene doit nous rejoindre bientot... Il va y avoir du monde sur la route! ca devient le peoloton la..

Commentaires: 8
  • #8

    Lotte (dimanche, 25 avril 2010 20:25)

    ah, merci pour les news et les photos surtout !! (et aussi de nous tenir informés de vos petits soucis gastriques... comment survivent vos peu de sous-vêtements du coup ???)
    C'est vrai que vous faites très couleur locale avec vos "tuniques"! A quand la chemise jaune avec le pull voilet?

    Faites attention sur la route quand même (les éboulements ont l'air fréquent..) et profitez-bien!
    Biz

  • #7

    Piju (des grosses têtes) (mercredi, 21 avril 2010 00:38)

    Je sais qu'il doit vous tarder de retourner au travail, tailler une bavette avec les collègues mais s'il vous plait, ne vous dépêchez pas trop, c'est pas la course (et pas du tout l'esprit de ce voyage).
    Bon courage à vous 2 qui vous ennuyez si loin de vos familles et de vos amis... :P
    Romain: comment fonctionnent tous tes plans dragues mis au point a Strasbourg??? Tu n'en parles jamais, c'est dommage!

  • #6

    Eleonora (mardi, 20 avril 2010 00:01)

    Merci pour cette nouvelle mise à jour..pour les photos et les commentaires précis et toujours très interessants au niveau géopolitique et historique. Bien sur, très droles aussi!
    En regardant les photos il me semble que certains paysages que vous avez croisés sont assez..'violents' pour l'aridité qu'ils expriment.
    Moi, j'aurais très peur:)
    Une très bonne continuation (mieux sans puces:))

  • #5

    Nadine et Chiên (samedi, 17 avril 2010 22:19)

    Un petit aperçu de la vie au Pakistan, on a envie d'en savoir plus...
    Après le vêtement traditionnel,à quand les vélos peints de toutes les couleurs?
    Nous avons bien noté la pub clandestine pour des produits du terroir périgourdin que nous ne nommerons pas.
    Bon courage à vos estomacs, bonne route

  • #4

    Michel et Agnes (jeudi, 15 avril 2010 07:59)

    Bravo pour vos tenues ...Romain tu n'as trouve que du XXL?
    Evenou shalom alherem du bord du lac de Tiberiade.
    Merci pour ce bon article et de toutes vos belles photos .
    Bises de p'pa et m'mam.

  • #3

    Mag & Jules (mercredi, 14 avril 2010 11:25)

    Vous êtes des fous les gars, vous êtes des fous ! Trop classes les tofs, comme d'hab !
    Bisous

  • #2

    clementoperez (mercredi, 14 avril 2010 10:10)

    super la descente de pushkart, coool rasta!!!

  • #1

    kametju (mardi, 13 avril 2010 23:48)

    Petit plaisir apres plusieurs jours a guetter le prochain post !
    Trop bon de voir vos gueules... Romain, t'etais pas blond ??? en tout cas, vous vous fondez parfaitement dans le paysage. Je vous ai cherche sur certaines photos.
    De otre cote, on enchaine apero et grosses bouffes et attaquons notre tour de France des copains-famille. C'est eprouvant et ca va l'etre encore !
    Cam a passe le cap des 30 ans avec succes ce week-end !

    Bises a vous deux et nous croisons les doigts pour le visa iranien.

    Kametju